Remboursement par anticipation d’un prêt hypothécaire de plus de 5 ans

Le gouvernement du Canada publiait, dans la Gazette du Canada, le 9 novembre dernier (2011), son « Règlement prévoyant les entités et les catégories d’hypothèques », adopté en vertu du paragraphe 10(3) de la Loi sur l’intérêt (ci après la « Loi »).

La Loi s’applique dans tout le Canada. Essentiellement, cette Loi règlemente le taux d’intérêt qui peut être stipulé, alloué ou exigé en vertu de tout contrat ou convention quelconque.

Les articles 10 et suivants de la Loi traitent de l’intérêt qui peut être exigé sur des deniers garantis par hypothèque sur des immeubles ou sur des biens réels. L’article 10 de la Loi traite plus particulièrement du remboursement par anticipation d’un prêt hypothécaire.

L’article 10(1) de la Loi précise, comme principe général, que les prêts hypothécaires de plus 5 ans peuvent être remboursés par anticipation, après 5 ans, en versant 3 mois d’intérêts à titre de pénalité.

Le droit de rembourser par anticipation prévu à l’article 10(1) de la Loi a été adopté, initialement, par le Parlement canadien, en 1880; le législateur cherchait alors à remédier au problème des agriculteurs, lesquels étaient aux prises avec des prêts hypothécaires à long terme, assortis de taux d’intérêt très élevés et assujettis à d’importantes primes ou pénalités en cas de remboursement par anticipation.

Cependant, quelques décennies plus tard, plusieurs compagnies (dont, notamment, les compagnies de chemin de fer) rencontraient d’importantes difficultés lorsqu’elles tentaient d’obtenir des financements à long terme (soit, évidemment, de plus de 5 ans) au moyen de prêts garantis par des hypothèques immobilières; évidemment, dans un tel contexte, les prêteurs hésitaient énormément à prêter de l’argent à long terme à ces compagnies, s’il était possible, pour celles-ci, de rembourser leur prêt après 5 ans, en ne payant que 3 mois d’intérêts, à titre de pénalité.

Un deuxième paragraphe fut donc alors ajouté, à cette époque, à l’article 10 de la Loi, afin de régler ce problème et afin de faciliter les emprunts commerciaux à long terme, le tout en prévoyant que les compagnies par actions ou toutes autres personnes morales ne pourraient se prévaloir de cette possibilité de payer par anticipation un prêt hypothécaire ayant une durée de plus 5 ans en ne payant que 3 mois d’intérêts à titre de pénalité. Cependant, de nos jours, les opérations commerciales sont fréquemment structurées au moyen de sociétés en commandite, de sociétés de personnes ou de fiducies; évidemment, ni l’une ni l’autre de ces entités ne sont des personnes morales. Ceci est particulièrement vrai dans le secteur immobilier.

Dans ce contexte, étant donné que les taux d’intérêt sont à leur plus bas niveau historique, étant donné que plusieurs prêteurs potentiels disposent de fonds disponibles importants qu’ils sont prêts à prêter à long terme, plusieurs propriétaires cherchent présentement à se financer à beaucoup plus long terme.

L’article 10 de la Loi, tel qu’il était rédigé jusqu’en 2008, posait donc problème, étant donné que seule une compagnie par actions ou une personne morale pouvait avoir accès au financement à très long terme sans que son prêteur n’encourt le risque d’un remboursement anticipé assujetti à la seule pénalité de 3 mois d’intérêts.

C’est ainsi que la Loi sur l’intérêt fut modifiée, à compter du 18 juin 2008, pour prévoir que le paragraphe 10(1) de la Loi ne s’appliquerait pas « à l’hypothèque sur immeubles ou biens réels visée par règlement qui est consentie par une entité prévue par règlement …, dont le remboursement a été garanti au moyen d’une telle hypothèque ». Or, le gouvernement du Canada a publié, dans la Gazette du Canada, le 9 novembre 2011, le « Règlement prévoyant les entités et les catégories d’hypothèques ».

Par l’adoption de ce règlement, le gouvernement vise à accorder à toutes les entités commerciales le droit de négocier les modalités de remboursement anticipé de leur prêt hypothécaire.

Ainsi, en ce qui a trait aux hypothèques immobilières conclues après le 1er janvier 2012, certaines entités à responsabilité illimitée (en vertu des lois de l’Alberta, de la Colombie Britannique et de la Nouvelle-Écosse), les sociétés de personnes, ainsi que les fiducies réglées à des fins commerciales ou d’affaires pourront négocier avec leur prêteur les modalités de remboursement anticipé qu’elles jugeront appropriées, étant entendu qu’elles n’auront plus la possibilité de se prévaloir de l’article 10(1) de la Loi et de rembourser leur prêt par anticipation en ne payant que 3 mois d’intérêts à titre de pénalité. Quant aux fiducies, il est évident qu’il est possible de les établir pour une large gamme de raisons, y compris les raisons personnelles, les raisons caritatives et les activités éducatives, en plus des raisons commerciales.

Par conséquent, conformément à l’objectif visé par le gouvernement fédéral, seules les fiducies réglées à des fins commerciales ou d’affaires auront la possibilité de négocier elles-mêmes leurs privilèges de remboursement anticipé.

Ces nouvelles dispositions réglementaires ont été adoptées suite aux observations qui ont été présentées par les principales parties prenantes de l’industrie et de l’immobilier, comme l’Association des banquiers canadiens, l’Association du Barreau canadien, l’Association canadienne des compagnies d’assurances de personnes et plusieurs cabinets d’avocats nationaux.

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