L’entente de franchise et sa protection du territoire

Dans presque toutes les ententes de franchise, il est prévu une clause de protection du territoire afin de protéger l’achalandage du franchisé dans une zone préalablement délimitée, soit son secteur commercial.  Une telle clause avait été négociée de gré à gré entre un franchiseur et son franchisé, laquelle fut l’objet d’un litige dont la Cour d’appel, sous la plume du juge Guy Gagnon dans Martineau c. Société Canadian Tire ltée (2011 QCCA 2198) le 1er décembre 2011, se pencha.

Les faits de l’affaire :  Monsieur Réal Martineau, un franchisé de longue date de la bannière Canadian Tire (depuis plus de 40 ans et exploitant cinq magasins) se plaint que Canadian Tire a commis un dol par réticence lorsqu’il fut le temps pour lui de proroger son contrat de marchand en octobre 1999 et allégue que Canadian Tire aurait ouvert à son insu deux nouveaux magasins dans la zone commerciale du franchisé, soit l’un à Blainville et l’autre à Fabreville à Laval.

Dans le contrat de marchand liant M. Martineau à Canadian Tire, il est prévu à la clause 1 b) (vi) ce qui suit :

«  (vi) la société convient de ne pas exploiter, ni de permettre à toute personne physique ou morale d’exploiter, un magasin associé qui pourrait nuire considérablement aux ventes du Magasin associé du Marchand, sauf si la Société a de bonnes raisons de croire, après avoir consulté le Marchand et fait produire une étude que le marché possible à l’intérieur du secteur commercial du Magasin associé du Marchand est suffisamment important pour permettre l’établissement d’un deuxième magasin associé situé dans le secteur en question ou en servant une partie.  Le cas échéant, la Société pourra, après avoir donné un avis raisonnable au Marchand et lui avoir donné l’occasion de s’y opposer, accorder le droit à un autre marchand d’être propriétaire d’un tel magasin associé supplémentaire et de l’exploiter, sous réserve du droit du Marchand de toucher une indemnité de la Société conformément aux lignes de conduite établies par la Société relativement à la violation du marché.».

Ouverture du magasin à Blainville :  Selon les faits, M. Martineau aurait su avant qu’il exerce son droit de prorogation, soit avant le 7 octobre 1999, que Canadian Tire allait implanter un nouveau magasin portant la bannière Canadian Tire à Blainville, il ne pouvait donc plus s’en plaindre.

Ouverture du magasin à Fabreville à Laval:  Pour ce qui est de cet implantation, les faits démontrent que M. Martineau l’aurait su après qu’il se soit prévalu de son droit de prorogation, soit après le 7 octobre 1999.  Cependant, toujours selon les faits, le juge rappelle qu’aucun préjudice n’aurait été subi par M. Martineau du fait :

  • Que ses gains avant salaire ont augmenté considérablement durant la période qui a suivi l’ouverture du magasin de Fabreville; et
  • Que le franchisé aurait requis en 2007 l’agrandissement de la superficie de son plancher d’environ 25 000 pieds carrés.

Aussi, dans cette affaire, le juge Gagnon rappelle clairement qu’il est du devoir d’un homme d’affaires raisonnable placé dans les mêmes circonstances de procéder à ses propres analyses financières et que M. Martineau ne peut s’indigner du fait que Canadian Tire ne lui aurait pas communiqué les informations financières et ce, tel que mentionné dans le jugement sous la rubrique « L’obligation d’informer et l’obligation de consulter ».

En conclusion – Lors de la négociation d’une entente de franchise, il est important de voir à bien protéger son territoire, cependant, il l’est d’autant plus de savoir bien le défendre.

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