Les recours des actionnaires minoritaires : LSAQ vs LCSA

Depuis l’entrée en vigueur de la Loi sur les sociétés par actions  (Québec) (la « LSAQ »), les actionnaires minoritaires de société québécoise semblent avoir grandement amélioré leur condition. Traditionnellement, en faculté de droit, on nous apprenait en effet que les actionnaires minoritaires de ces sociétés étaient les « enfants pauvres » des sociétés canadiennes. Cette opinion émanait notamment du fait que ces actionnaires minoritaires n’avaient pas, contrairement à leurs homologues des sociétés fédérales et de la grande majorité des autres sociétés provinciales canadiennes, un recours statutaire en cas d’oppression.  

Qu’en est-il aujourd’hui, soit un peu plus d’un an après l’entrée en vigueur de la LSAQ? Dans le billet qui suit, une brève étude comparative entre les recours offerts aux actionnaires minoritaires de société québécoise et ceux offerts aux actionnaires minoritaires de société incorporée en vertu de la Loi canadienne sur les sociétés par actions (la « LCSA ») sera effectuée.  

Les recours octroyés aux actionnaires se retrouvent aux articles 421 et suivants de la LSAQ et le droit au rachat d’action, similaire au droit à la dissidence prévu à l’article 190(1) de la LCSA, se trouve quant à lui aux articles 372 et suivants de la LSAQ.  

Les articles 372 et suivants de la LSAQ codifient en droit corporatif québécois le droit pour tous les actionnaires, y compris les actionnaires ne détenant pas de droit de vote, d’exiger le rachat par la société de la totalité de leurs actions dans certaines circonstances particulières. Il s’agit là d’un droit bien similaire au droit à la dissidence prévu à la LCSA.  

Aux articles 421 et suivants de la LSAQ, on retrouve la possibilité pour le tribunal d’ordonner, à la demande du détenteur ou du bénéficiaire d’une valeur mobilière, la tenue d’une enquête sur la société ou sur toute société du même groupe. Il s’agit là d’un pouvoir similaire à celui prévu à l’article 229 de la LCSA.  

Aux articles 450 et suivants LSAQ, on codifie, en droit québécois, un recours similaire au recours en oppression de la LCSA disponible aux actionnaires minoritaires. Contrairement à ce que prévoit la LCSA, la LSAQ prévoit qu’un tel recours pourra être intenté non seulement si la société ou ses administrateurs ont commis un abus ou porté un préjudice injuste au demandeur, mais aussi s’ils s’apprêtent à commettre ou causer pareil un abus ou préjudice injuste. Le recours en oppression sous la LSAQ demeure cependant plus restrictif que celui pouvant être entrepris sous la LCSA puisqu’il n’est pas ouvert aux créanciers de la société et qu’il ne peut être mis en œuvre si la société ou ses administrateurs ne font qu’omettre injustement de tenir compte des intérêts du demandeur. Par ailleurs, tout comme la LCSA, l’article 450 de la LSAQ octroie aussi de vastes pouvoir au tribunal, allant jusqu’à l’établissement ou la modification d’une convention unanime entre actionnaires.  

Les articles 445 et suivants de la LSAQ mettent quant à eux en place un recours similaire à l’action oblique prévu à l’article 239 de la LCSA. La LSAQ permet toutefois au tribunal d’ordonner la communication par la société de tout document pertinent au litige au demandeur, disposition qui n’existe pas sous la LCSA. L’article 447 de la LSAQ prévoit par ailleurs expressément que le tribunal peut rendre toute ordonnance qu’il estime appropriée dans le cadre d’une action oblique, dont notamment la modification des statuts ou de la convention unanime entre actionnaires de la société, la nomination d’administrateurs et le paiement par la société ou sa filiale des honoraires extrajudiciaires encourus par le demandeur.  

Il semble donc à première vue que les actionnaires minoritaires des sociétés québécoises soient désormais mieux outillés et qu’ils disposent de recours similaires, quoi que non identiques, à ceux disponibles aux actionnaires minoritaires de sociétés fédérales.

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