Contrats d’approvisionnement en gaz russe : des enjeux contractuels
Après l’invasion de l’Ukraine par la Russie, la communauté internationale, menée par les États-Unis et l’Union européenne (UE), a imposé à la Russie des sanctions économiques importantes. Cependant, à ce jour, la Russie continue de vendre du gaz à différents pays de l’UE, pour des montants qui se chiffrent en milliards de dollars chaque mois. Plusieurs voix se sont donc élevées pour demander à l’UE d’arrêter l’importation de gaz russe. Cette mesure ne fait toutefois pas l’unanimité dans l’UE en raison de la grande dépendance de certains de ses membres au gaz russe.
Au-delà de l’enjeu de dépendance énergétique, certains observateurs ont aussi souligné que l’arrêt complet de l’importation de gaz russe se heurte à certains obstacles importants sur le plan juridique :
- Dans le secteur de l’énergie, les contrats d’approvisionnement prévoient souvent une clause « Take or Pay » (traduite littéralement, « Prendre ou payer »). C’est une clause par laquelle l’acheteur s’engage à prendre livraison (take) d’un volume précis prévu au contrat ou, à défaut, à le payer (pay) au vendeur. Ainsi, même si l’acheteur décide de ne pas prendre livraison du volume prévu au contrat, il devra néanmoins payer au vendeur le montant correspondant à ce volume. Cette clause garantit au vendeur une source de revenus et lui permet donc souvent de sécuriser un financement avec un prêteur, puisque l’investissement financier de départ dans le secteur de l’énergie est très élevé.
- Un contrat d’approvisionnement en gaz a généralement une durée très élevée (25 ou 30 ans) ; puisque c’est un contrat à long terme, l’acheteur qui résilie le contrat s’expose à des pénalités contractuelles très élevées. C’est d’ailleurs pour cette raison que la stratégie retenue jusqu’à présent a été de mettre fin uniquement aux contrats à court terme et d’honorer ceux à long terme.
Une possible porte de sortie ? Si l’UE décide d’imposer un embargo total sur l’importation de gaz russe, les acheteurs pourraient invoquer le cas de « force majeure » puisque, dans les faits, l’approvisionnement en gaz deviendrait impossible. Considérant l’importance de l’enjeu de dépendance énergétique, il ne faut cependant pas s’y attendre à court terme.