Non-respect de l’obligation de divulgation: la Cour d’appel réitère l’importance de prouver les dommages

Dans une décision récente, la Cour d’appel s’est penchée sur l’étendue de l’obligation de se renseigner et l’obligation de divulgation dans le cadre de la vente de la totalité des actions d’une société. Cette décision énonce qu’en l’absence de dommages pour l’acheteur, le manquement du vendeur à son obligation de divulgation ne donne pas lieu à compensation.

Faits

Cette affaire oppose les sociétés 9036-5560 Québec inc. et Jos Besson (1993) inc. (les «Acheteurs») à Jean-Yves Lecavalier (le «Vendeur»). Après avoir fait l’acquisition de la totalité des actions de la société du Vendeur, les Acheteurs réalisent, entre autres choses, que celui-ci ne leur a pas divulgué l’existence d’une dette exigible de la société s’élevant à plus de 83 000$.

En raison de cette omission, les Acheteurs réclament au Vendeur le remboursement du prix de la dette non divulguée. En demande reconventionnelle, le Vendeur réclame le paiement des sommes dues dans le cadre de la vente de la totalité des actions.

Première instance

La Cour supérieure a, en partie, donné raison aux Acheteurs. Elle est d’avis que la dette camouflée constitue une information financière importante que le Vendeur aurait dû divulguer. De plus, la Cour rejette l’argument du Vendeur selon lequel les Acheteurs auraient manqué à leur obligation de se renseigner. Ce faisant, elle accueille l’action des Acheteurs, de même que la demande reconventionnelle du Vendeur en opérant compensation entre les sommes qu’ils se doivent réciproquement. Insatisfait de cette décision, le Vendeur porte la cause en appel.

Décision

L’appel est accueilli en partie. Au soutien de son pourvoi, le Vendeur plaide que les Acheteurs ont manqué de prudence et de diligence quant à leur obligation de se renseigner.

La Cour d’appel rejette cependant cet argument puisqu’elle est d’avis que la portée de l’obligation de se renseigner est, en l’espèce, atténuée par les remarques du Vendeur et de l’expert comptable de la société ayant fait l’objet de la vente. En effet, tous deux étaient d’avis que les états financiers fournis aux Acheteurs étaient représentatifs de la situation de la société. L’étendue de cette obligation est également réduite en raison des garanties données par le Vendeur, à savoir que les dettes de la société étaient acquittées au fur et à mesure de leur échéance.

Ainsi, la Cour est d’avis qu’«on ne saurait reprocher à l’intimée 9036 de ne pas avoir découvert l’existence de la dette camouflée par l’appelant, alors que même le comptable de l’entreprise n’a pas été en mesure de l’identifier».

Malgré cette conclusion, la Cour partage l’avis du Vendeur selon lequel la Cour supérieure a erré en le condamnant au paiement de la dette. Bien que le Vendeur ait commis une faute en camouflant l’existence d’une dette exigible, les Acheteurs n’ont subi aucun dommage. En effet, ils n’ont pas démontré que le prix de vente des actions aurait été moins élevé si la dette avait été divulguée. De plus, contrairement à ce que les Acheteurs soutiennent, la démonstration d’une faute n’entraîne pas le renversement du fardeau de preuve sur les épaules du Vendeur à l’égard des dommages.

Cette décision réitère donc que, conformément au principe général énoncé à l’article 1607 C.c.Q., un préjudice doit résulter du manquement à l’obligation de divulgation pour que la partie lésée ait droit à une compensation.

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