Les renonciations de droits: Ça ne sent pas bon

Les règles du louage peuvent, à moins qu’elles ne soient d’ordre public, être écartées ou modifiées par contrat, mais cela doit être fait de façon non équivoque, surtout lorsqu’il s’agit d’un contrat d’adhésion.

C’est du moins ce qui ressort d’une décision récente de la Cour d’Appel dans l’affaire Société de Gestion Complan (1980) inc. c. Bell Distribution inc. dans laquelle, la Cour en vient à la conclusion que le locataire n’avait pas renoncé à son droit à la jouissance paisible des lieux, ni à son droit à l’exception d’inexécution.

Le locataire se plaignait  d’odeur nauséabonde, et comme l’odeur persistait malgré les travaux faits par le propriétaire, le locataire a obtenu une expertise qui concluait qu’il y avait un danger pour certains de ses employés.  L’odeur semblait provenir d’excréments de rongeurs et de produits chimiques qui se trouvaient sous le plancher des bureaux du locataire. Le problème n’étant toujours pas résolu par le propriétaire, le locataire a décidé de relocaliser les employés touchés par l’odeur, et de diminuer le loyer payé de façon proportionnelle.  Une réclamation pour loyer impayé a par la suite été produite par le propriétaire.

La Cour d’Appel en vient d’abord à la conclusion que l’odeur peut être une violation à l’obligation d’offrir la jouissance paisible des lieux.  Le propriétaire plaidait cependant qu’il importait peu de savoir si cela constituait  une telle violation puisque le bail prévoyait que le propriétaire ne pouvait être tenu responsable de quelques dommages que ce soit, sauf quelques exceptions qui ne s’appliquaient pas en l’espèce.  La Cour conclu que les clauses qui contenaient de telles exonérations, n’avait rien à voir avec la jouissance paisible des lieux, mais plutôt semblaient avoir trait aux travaux qui devaient être effectués par le locataire.  Le bail, dans ce cas, étant un contrat d’adhésion, il devait être interprété contre le propriétaire.

Le propriétaire plaidait ensuite que même s’il y avait eu violation du droit à la jouissance paisible des lieux, le locataire n’avait pas le droit de réduire son loyer.  En effet, il était prévu au bail que le locataire renonçait au droit qui lui était accordé par l’article 1863, 2ieme alinéa, C.c.Q.:

L’inexécution confère, en outre, au locataire le droit de demander une diminution de loyer…

La Cour d’Appel ne retient pas cet argument.  Elle précise d’abord que, même si dans le passé il y a eu des doutes quant à l’application de l’exception d’inexécution au bail, il est maintenant bien établi qu’elle s’applique, au moins en ce qui concerne le bail commercial.  Ensuite, elle décide que malgré la renonciation à ce droit dans le bail, puisqu’il n’y a aucune mention que cette renonciation s’applique à une violation de la jouissance paisible des lieux, le locataire avait le droit de réduire le loyer de façon proportionnelle.

La Cour a rejeté la réclamation pour loyer impayé du propriétaire.

Ce qui ressort clairement de cette décision c’est que pour qu’il y ait renonciation à un droit, elle ne doit souffrir d’aucune ambiguïté, surtout dans le cadre d’un contrat d’adhésion.

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