Le rappel d’un produit non sécuritaire: l’importance de l’adoption immédiate d’un plan de crise
Vous recevez un appel d’un client qui a acheté un des produits que vous distribuez au Canada (par exemple, une chaise). Ce consommateur croit que le produit est dangereux. Il vous rapporte un accident relatif à l’utilisation de ce bien. Soudainement, un des pieds s’est dévissé par lui-même et la personne est tombée, se blessant. Puis, quelques autres appels sont reçus, au même effet. Après enquête, vous découvrez que d’autres cas furent rapportés à l’étranger. La Loi sur la sécurité des produits de consommation est entrée en vigueur il y a quelques semaines. Le Canada adopte un régime semblable à celui qui existe aux Etats-Unis tout en harmonisant le processus avec celui de la Communauté européenne. Ces administrations collaborent ensemble et s’échangent des informations, notamment dans le cadre de programmes de rappels de produits dangereux.
La Loi vous impose désormais des obligations accrues en tant qu’importateur, distributeur, fabricant ou vendeur à des fins commerciales d’un bien de consommation. Tout produit de consommation est couvert, même l’emballage, sauf les exceptions visées (cosmétiques, produits et matériels médicaux, véhicules etc.).
La Loi vous oblige à communiquer au ministre de la santé tout renseignement concernant ces incidents liés au produit potentiellement dangereux dans les deux jours suivant la connaissance du risque ou du danger. Même si vous apprenez qu’un produit autre que celui que vous fabriquez ou vendez est en cause, vous avez un devoir de faire rapport si, par exemple, l’autre bien comporte une composante semblable à celle qui est incorporée à votre bien. Il en serait ainsi si vous utilisez, comme d’autres fabricants, le même fournisseur pour les vis ayant fait défaut dans l’exemple de la chaise.
Pour décider si le risque doit être rapporté au ministre, vous devez déterminer si un incident est survenu au sens de la loi et si celui-ci laisse croire que le produit pose un risque déraisonnable par suite de son utilisation normale ou prévisible, ce qui peut aller jusqu’à une mauvaise utilisation prévisible. Ainsi, les machines distribuant des boissons gazeuses ont causé des décès et lésions graves car certaines personnes tentaient de faire basculer l’appareil dans l’espoir de récupérer une cannette, engendrant la chute du mastodonte. Même si cette utilisation n’est pas prescrite, elle est prévisible et le risque doit donc faire l’objet d’une divulgation au ministre.
Vous serez tenu de procéder à une divulgation complète des informations dont vous disposez quant à l’incident. Le ministre possède des pouvoirs d’intervention advenant que le distributeur néglige d’agir rapidement.
Toute telle situation se présente généralement à l’improviste et il est essentiel de gérer ce qui peut devenir une crise grave, lourde de répercussions pour l’importateur, distributeur ou vendeur du produit dangereux. L’image de votre société ou la réputation d’un produit peut être irrémédiablement atteinte si la crise n’est pas adéquatement gérée.
Il est essentiel de construire aujourd’hui l’équipe dédiée à la gestion de cette crise si elle devait survenir. Ainsi, les membres de l’équipe se voient attribuer certaines tâches précises. L’un enquêtera sur l’incident, l’autre communiquera avec le responsable des ventes pour déterminer si d’autres cas furent rapportés, un autre encore mandatera un expert pour étudier la cause du bris. Il est parfois nécessaire d’avoir un spécialiste en communications et gestion de crise prêt à intervenir. Tous les appels de l’extérieur doivent être acheminés à une personne désignée au sein de l’entreprise. Il en va de même des communications avec Santé Canada.
Si le produit est dangereux et qu’il faut procéder à son rappel, le responsable voudra gérer ce processus dans la plus grande transparence en ce qui concerne les autorités. Pour ce faire, il doit pouvoir rejoindre rapidement sa clientèle ou le public en général. Il doit pouvoir mettre en place un centre d’appels avec du personnel bilingue, formé pour répondre aux questions, expliquer, diriger et acheminer l’information. Il faut s’assurer de la plus grande couverture médiatique du rappel pour garantir son succès. Des publicités dans les journaux, un site Internet, des affiches dans les magasins ayant vendu le produit dangereux. Ce sont là les principales mesures mais chaque cas est différent.
Le rappel peut couvrir le Canada mais aussi les Etats-Unis, donnant ainsi lieu à des obligations distinctes envers la US Consumer Product Safety Commission.
Si le rappel doit donner lieu au retour des produits, il faut envisager un entrepôt avec une équipe préparée pour recevoir les biens retournés, identifier l’expéditeur et traiter les remboursements ou politiques d’échange mises en place.
Le risque d’un recours collectif ne pouvant être exclu dans le cas d’un rappel national d’un produit, il faut également faire preuve de prudence tout en respectant à la lettre chacune des prescriptions de la Loi et de ses règlements.
En étant préparé, vous pouvez minimiser les risques sur votre entreprise découlant de la crise financière, médiatique ou juridique qui peut accompagner la nécessité de procéder à un rappel.