Le contrat de société : sa formation, son étendue et ses limites
Lorsque vient le temps de s’unir à des partenaires à l’aube d’une nouvelle aventure commerciale, l’une des premières considérations des parties devrait être la forme juridique que revêtira cette collaboration d’affaires. Plus souvent qu’autrement, ces dernières conviendront d’opérer par l’entremise d’une société contractuelle, à savoir une société par actions (compagnie ou corporation), une société en nom collectif, une société en commandite ou une société en participation.
La société par actions est une personne morale au sens du Code civil du Québec possédant une personnalité et un patrimoine entièrement distincts de ceux de ses actionnaires. Pour leur part, les sociétés en nom collectif et en commandite entretiennent des rapports plus étroits avec leurs associés mais conservent tout de même une indépendance limitée grâce à certains attributs de la personnalité juridique qui leur sont reconnus par la loi et la jurisprudence ainsi qu’à la reconnaissance d’un patrimoine qui leur est propre. Quant à elle, la société en participation (souvent de création implicite) ne possède ni patrimoine distinct, ni attribut de la personnalité juridique, rendant son existence d’une fragilité précaire qui dépend directement de la situation de ses associés.
Ceci dit, la formation d’une société est conditionnelle à la conclusion d’un contrat écrit ou verbal, voir implicite, par des personnes convenant, dans un esprit de collaboration, d’exercer une activité, d’y contribuer en biens, en connaissances ou en activités et de se partager les bénéfices qui en résultent. Il y a donc formation d’une société dès que cette situation existe entre les parties. De surplus, puisque la société en participation n’a pas l’obligation de s’immatriculer auprès du Registraire des entreprises du Québec, il arrive souvent que des personnes exercent leurs activités sous cette forme de société sans en être au courant.
En ce qui a trait aux rapports juridiques, le législateur a prévu des dispositions au Code civil du Québec, dans le cas des sociétés en nom collectif, en commandite et en participation, régissant d’une part, les rapports des associés entre eux et envers la société et, d’autre part, leurs rapports envers les tiers. La majorité de ces règles sont supplétives, donnant ainsi la possibilité aux parties d’y déroger et/ou de prévoir des règles supplémentaires dépendamment de leur situation d’affaires. Par exemple, il serait utile dans le cas des sociétés en nom collectif et en commandite de permettre aux associés d’hypothéquer leur part dans l’actif de la société sans devoir obtenir le consentement des autres associés (qui est la règle supplétive). Également, les parties pourraient prévoir leurs propres règles relatives au mode de gestion de la société ainsi que les modalités de prise des décisions (selon l’importance des questions à trancher).
Cette liberté contractuelle est cependant limitée par des dispositions d’ordre public auxquelles il est interdit de déroger. Entre autres, il est interdit d’exclure l’un des associés du partage des bénéfices, de lui refuser le droit de participer aux décisions collectives ou de le soustraire du paiement des dettes envers les tiers.
En conclusion, lorsqu’on entame une aventure commerciale commune avec des partenaires d’affaires, il est important de se questionner sur la structure juridique à adopter, de se renseigner sur les limites imposées par la loi et sur les éléments propres à la situation d’affaires qui devraient se retrouver dans le contrat de société afin de s’assurer d’avoir, entre les parties, une situation juridique légale comprise par eux, leur offrant les outils pour prendre les décisions d’affaires sans avoir à rencontrer (dans la mesure du possible) des obstacles techniques et juridiques.