Le retour en force du contrat B
Comme il est maintenant bien établi depuis l’arrêt de la Cour Suprême dans l’affaire Double N Earthmovers Ltd c. Ville de Edmonton en 2007, il existe en matière d’appel d’offres deux contrats distincts: le Contrat A qui régit les règles et obligations entre le donneur d’ordre et tous les soumissionnaires dans le but de procéder à la sélection, et le Contrat B formé uniquement entre le donneur d’ordre et le soumissionnaire retenu.
Dans une décision récente (W. Côté & Fils Ltée c. Ville de Brownsburg-Chatham, 2012 QCCS 307), la Cour Supérieure nous rappelle que les soumissionnaires qui n’ont pas été retenus ne peuvent avoir de recours contre le donneur d’ordre en cas d’inexécution d’une ou plusieurs conditions lors de l’exécution du contrat B, lequel ne regarde que les deux parties à ce contrat. Dans cette affaire, le deuxième soumissionnaire s’est plaint des nombreuses divergences techniques entre ce que le premier soumissionnaire a livré et le devis prévu. Dans les faits, il s’agissait de modifications à certains équipements, modifications qui selon le deuxième soumissionnaire changeaient la portée même de l’appel d’offres. La Cour a statué que la Ville pouvait, une fois le contrat B en exécution, procéder à des changements si cela était dans son intérêt et qu’une fois le contrat B formé, l’inexécution ne concerne plus les autres soumissionnaires.
Bravo pour la force du contrat B qui nous rappelle que la finalité d’un processus d’appel d’offres demeure contractuel. Sauf qu’il ne faudrait pas oublier qu’en matière de marchés publics, tout donneur d’ordre doit exercer sa discrétion, liberté contractuelle ou non, dans le respect des règles prévues dans les lois et règlements. Et qu’une des règles d’or est de ne pas changer la nature du contrat. Peut-être cela ne regardera plus les autres soumissionnaires, mais en tout cas, ça regarde tout le monde!