Le lieu de naissance du contrat à l’ère de la technologie

Le lieu de naissance d’un contrat, c’est-à-dire l’endroit où il a réellement ou présumément été conclu,  sert non seulement à établir le droit applicable à ce dernier mais aussi à identifier la juridiction ou, si l’on préfère, la localité appropriée pour débattre de tout différend qui peut en résulter. Lorsque les parties à un contrat se trouvent en présence l’une de l’autre dans un même lieu physique lors de l’acceptation de celui-ci, la tâche d’établir le lieu de naissance n’a rien de très compliqué. Il en va autrement, lorsque celles-ci transigent à distance en faisant appel à des moyens technologiques parfois invisibles.

Dans une affaire récente, la Cour d’Appel du Québec a, de nouveau, eu à se prononcer sur une des nombreuses questions que suscitent l’utilisation de moyens technologiques dans nos échanges commerciaux . Les faits de cette affaire sont relativement simples. Une entreprise de Lavaltrie prend action dans le district judiciaire de Joliette pour réclamer une somme de 111 000$ au co-contractant de l’une de ses filiales, établie dans le district judiciaire d’Abitibi. Elle invoque, à l’appui de son choix du lieu d’action, le fait que son serveur local en Abitibi redirige les appels téléphoniques et télécopies, destinés à sa filiale, au siège social de la société-mère située à Lavaltrie. Son co-contractant s’oppose à ce choix en invoquant le fait qu’il a acheminé sa correspondance électronique à Chapais en Abitibi, domicile de la filiale. Il revendique plutôt la juridiction du district judiciaire d’Abitibi comme lieu approprié pour débattre de ce litige.

La Cour se range du côté du co-contactant en signalant qu’il ne faut pas confondre le lieu de la réception de l’acceptation avec le lieu de la prise de connaissance de cette acceptation. En l’espèce, le lieu de la réception de l’acceptation correspond à la résidence ou à l’établissement de la filiale à Chapais puisqu’il s’agissait de l’endroit ou le co-contractant pouvait raisonnablement croire que son acceptation serait reçue. Bien que la Cour soulève deux autres motifs pour ancrer davantage le litige dans le district judiciaire d’Abitibi, à savoir la présence d’une clause d’élection en faveur de ce district et la règle de la proportionnalité qui se trouve à l’article 4.2 C.p.c. il est intéressant de noter qu’elle a voulu mettre de l’avant ce premier argument d’abord pour bien passer son message à ce propos.

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