Une clause de médiation obligatoire n’est pas vraiment « obligatoire »!

Une clause de médiation obligatoire est-elle vraiment « obligatoire« ? Si oui, quelles en sont les conséquences en cas de non-respect?

Le jugement rendu le 12 octobre dernier par la Cour du Québec dans l’affaire Corporation Inno-Centre du Québec c. Média Opti Rythmix (2012 QCCQ 8980) nous laisse quelque peu perplexe sur ces questions.

Le contrat sur lequel le tribunal était appelé à se pencher dans cette affaire stipulait la clause suivante:

« 15.1  Les parties conviennent que tout désaccord ou différend relatif à la présente convention ou découlant de son interprétation ou de son application sera soumis à une médiation suite à un avis écrit donné par une partie à l’autre partie. À cet effet, les parties désigneront conjointement un médiateur et elles s’engagent à participer à au moins une rencontre de médiation en y déléguant une personne en autorité de décision; si les parties ne peuvent s’entendre sur le choix d’un médiateur dans les quinze (15) jours de la réception de l’avis par son destinataire ou si aucune entente écrite n’intervient dans les trente (30) jours suivant la nomination du médiateur, ce différend sera tranché de façon définitive par voie d’arbitrage et à l’exclusion des tribunaux, selon les lois du Québec, suite à un avis donné par une avis à l’autre partie. »

Après que, malgré le libellé de cette clause, Corporation Inno-Centre du Québec ait institué une action devant la Cour du Québec pour réclamer une somme qu’elle prétendait lui être due en vertu de ce contrat, Média Opti Rythmix a demandé le renvoi de ce litige en arbitrage.

Au soutien de sa contestation de cette demande de renvoi à un tribunal d’arbitrage, Corporation Inno-Centre du Québec plaidait, entre autres, que Média Opti Rythmix ne pouvait se prévaloir de cette clause compromissoire puisqu’aucun avis de médiation n’avait été transmis conformément à celle-ci.

Tout en déclarant que cette clause constitue selon lui une clause compromissoire parfaite à laquelle il doit donner effet, le tribunal n’en écarte pas moins le caractère « obligatoire » de l’étape préalable de médiation.

Voici les commentaires du juge à ce propos:

« [13] En effet, la clause 15.1 de la Convention de services établit le souhait des parties de discuter du règlement du litige avant de référer l’affaire en arbitrage. Toutefois, elles n’ont jamais prévu, qu’à défaut de médiation, la clause d’arbitrage ne s’appliquerait plus. »

« [15] En tout état de cause, le fait que personne n’ait demandé la médiation ne change pas la volonté clairement exprimée des parties, de se soumettre à la compétence arbitrale pour régler un litige découlant de la Convention de services. »

Le tribunal a donc accueilli la requête et renvoyé cette affaire à l’arbitrage.

En résumé, la portion « arbitrage » a été jugée « obligatoire« , mais non la portion « médiation » pourtant stipulée à la même clause.

Le tribunal aurait-il pu, dans sa décision de renvoyer cette affaire à un tribunal arbitral, aussi ordonner aux parties de se soumettre à l’étape préalable de médiation avant de choisir leur arbitre?

Ce jugement illustre l’inconfort actuel des tribunaux lorsque confrontés à une clause de médiation obligatoire.

À court terme, une rédactrice (ou un rédacteur) d’une telle clause serait bien avisée de stipuler au contrat les conséquences du fait de ne pas s’y conformer.

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