Un franchiseur peut être tenu de divulguer ses évaluations internes!
Un jugement rendu tout récemment par la Cour d’appel du Québec vient jeter un nouvel éclairage sur l’étendue de l’obligation de renseignement d’un franchiseur, plus précisément en ce qui concerne ses rapports internes d’évaluation d’un candidat franchisé et d’un emplacement.
Dans cette affaire, une ex-franchisée de Franchises Cora inc. avait poursuivi cette dernière en annulation de sa convention de franchise et en dommages entre autres pour le motif que les représentants de Franchises Cora inc. ne lui avaient pas dévoilé le contenu d’un rapport interne d’évaluation de la future franchisée, les résultats d’un test psychométrique et la teneur d’un courriel interne dans lequel un représentant du franchiseur émettait certaines réserves sur un emplacement projeté.
Dans son jugement rejetant le recours de cette ex-franchisée, la Cour supérieure avait, entre autres, conclu que rien n’obligeait le franchiseur à dévoiler à sa nouvelle franchisée la teneur et les résultats de ses rapports et analyses internes, lesquels étaient préparés dans le seul but de permettre au franchiseur de décider d’octroyer une franchise à cette franchisée et d’accepter l’emplacement choisi pour une nouvelle franchise.
La Cour supérieure avait aussi conclu que, dans cette affaire, l’ex-franchisée n’avait pas réussi à prouver que la divulgation de ces documents l’aurait amené à ne pas signer la convention de franchise.
Par son jugement, la Cour d’appel du Québec rejette l’appel formulé par l’ex-franchisée en concluant que la juge de la Cour supérieure n’avait pas commis d’erreur manifeste en concluant que l’ex-franchisée aurait quand même probablement poursuivi ses démarches avec Franchises Cora inc. si elle avait pris connaissance des documents qui ne lui ont pas été divulgués par le franchiseur.
La Cour d’appel a néanmoins décidé que la juge de la Cour supérieure avait commis une erreur en droit en décidant que Franchises Cora inc. avait rempli son obligation de renseignement même si elle n’avait pas dévoilé la teneur de ces documents internes à sa future franchisée.
La Cour d’appel émet le principe suivant, et fort important, quant à l’obligation de renseignement à laquelle est tenu tout franchiseur au moment de la négociation avec un nouveau franchisé:
« Quoi qu’il en soit, une chose est certaine. La contrat de franchise, comme tout autre contrat, doit être gouverné par les règles de la bonne foi et l’obligation corrélative pour le franchiseur de porter à la connaissance de son cocontractant toute information en sa possession pouvant avoir une influence déterminante sur la volonté de contracter de ce dernier. »
Selon ce jugement du plus haut tribunal du Québec, si un franchiseur, même dans ses rapports, documents et échanges internes, possède une information qui, si elle était connue du futur franchisé, est susceptible d’avoir une « influence déterminante » sur sa décision de signer, ou de ne pas signer, la convention de franchise, le franchiseur a l’obligation de dévoiler cette information au futur franchisé.
S’il ne le fait pas, il s’expose à un éventuel recours en annulation de contrat et, évidemment, en dommages.
Vous pouvez consulter ce jugement de la Cour d’appel en cliquant ici et le jugement de la Cour supérieure en cliquant ici.
Il est aussi important de se rappeler que, en vertu de la Loi sur la protection des renseignements personnels dans le secteur privé, une entreprise est tenue de communiquer à toute personne physique sur laquelle elle possède un dossier (par exemple, un franchisé ou un candidat à une franchise), sur demande écrite de sa part, la teneur de tout dossier et de tout renseignement personnel qu’elle possède sur celle-ci.
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Jean H.