Réforme de la Loi sur les mines: nouvelle exigence de transformer les minerais au Québec

Cette semaine Martine Ouellet, la ministre des Ressources naturelles et de la Faune a déposé à l’Assemblée Nationale le projet de loi 43 proposant une réforme à Loi sur les mines. Ce billet traitera de l’une des réformes importantes incluses dans ce projet de loi soit celle qui permettra au gouvernement d’exiger que la transformation des minerais extraits se fasse au Québec. Il s’agit de l’une des promesses électorales faites par le Parti Québécois et ce genre d’exigence existe déjà dans d’autres provinces canadiennes.

Dans le projet de loi 43, l’exigence de transformer localement les minerais est rattachée aux conditions d’octroi du bail minier. Rappelons que toute entreprise minière désirant  exploiter au Québec doit préalablement conclure un bail minier avec le ministre des Ressources naturelles et de la Faune (le «ministre»). Le projet de loi 43 ajoute une exigence à l’obtention d’un tel bail: l’entreprise minière devra déposer une étude de faisabilité de la transformation au Québec du minerai. Suite à l’analyse de cette étude de faisabilité, le gouvernement pourra exiger la conclusion d’une entente pour que le minerai soit transformé au Québec. Il s’agit donc d’un pouvoir que le ministre pourra exercer à sa discrétion, à la lumière de l’étude de faisabilité.

Le «local beneficiation»

Dans le domaine minier, on appelle en Anglais «local beneficiation» les efforts qui sont mis de l’avant pour transformer localement les ressources extraites. En plus de créer de l’emploi, l’objectif de telles mesures est de maximiser des retombées économiques dans la juridiction dans laquelle les ressources sont exploitées. La transformation des produits miniers entraîne une prise de valeur et le but des mesures visant à encourager la transformation locale des ressources extraites est d’en faire profiter aux entreprises locales. Le schéma ci-dessous (source : Deloitte) illustre la prise de valeur du minerai au fur et à mesure qu’il est transformé, débutant à son extraction du sol jusqu’à sa livraison en tant que produit fini au consommateur :

Un exemple de « local beneficiation » peut être observé dans l’industrie diamantaire en Ontario. En 2008, le gouvernement ontarien a signé une entente avec la société minière De Beers afin que 10% de la production annuelle de diamants extraits de la mine Victor dans le Nord de l’Ontario soient coupés et polis dans la province. Cette entente a permis la création d’une cinquantaine d’emplois spécialisés et a permis la création d’une industrie qui génère un chiffre d’affaires de 35M$ par année. Bien que ces chiffres soient relativement modestes, le gouvernement Ontarien espère que sa province pourra profiter de la croissance de l’industrie diamantaire au cours des prochaines années et que d’autres entreprises diamantaires canadiennes seront encouragées à transformer leurs diamants au Canada. C’est un pari intéressant, quand on sait que le Canada est le troisième plus important producteur de diamants au monde. D’ailleurs, en 2010, la toute première bourse de diamants au Canada a ouvert ses portes à Toronto.

Au Québec

Au Québec, plusieurs projets miniers  d’extraction du fer, du zinc, de l’or, du lithium, du nickel et du diamant se développent en vue d’une exportation vers l’Asie ou l’Europe, où les coûts de transformation sont moins élevés et où une forte demande se situe. En conférence de presse, la ministre Ouellet a dit estimer que la transformation du minerai peut créer de trois à quatre fois plus d’emplois au Québec que la simple extraction. Le milieu syndical, pour sa part, estime qu’une hausse de la transformation de 10% permettrait de créer 7 500 emplois au Québec. Il sera intéressant de voir comment les mesures seront mises en place et plus spécifiquement, le genre d’ententes qui seront conclues.

Du côté de l’Association minière du Québec, on dit regretter l’introduction de cette mesure, qui fera augmenter les coûts de production et allongera les délais. Si ces mesures ajoutent nécessairement un  fardeau aux entreprises minières, la transformation au Québec des minerais contribuera certainement à l’acceptabilité sociale des projets, qui créeront davantage d’emplois dans les communautés. Je vous invite d’ailleurs à lire ce billet très intéressant de mon collègue Erik Richer La Flèche sur l’importance du « permis social » dans les projets miniers.

Suite des choses

Bien que les deux partis d’opposition aient accueilli le projet de loi avec ouverture, il y a encore un bon bout de chemin législatif à faire avant que ce projet de loi soit adopté. Rappelons que le gouvernement précédent avait tenté à deux reprises de modifier la Loi sur les mines, mais que les deux projets de loi sont morts au feuilleton.

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