Solution à la pénurie de main-d’œuvre?
Les clauses de non-concurrence font les manchettes depuis quelque temps. Parfaitement légales et faisant l’objet d’un encadrement législatif au Québec, elles sont régulièrement utilisées, notamment dans les contrats d’emploi. Mais leur utilisation est-elle à bon escient? De manière générale, il est logique et tout à fait compréhensible qu’une société ne souhaite pas perdre son employé et le voir livrer ses secrets commerciaux à un concurrent. Or, dans un contexte de pénurie de main-d’œuvre, y a-t-il lieu de réviser l’application de ces clauses?
C’est ce que prétend le président américain, Joe Biden. Il souhaite interdire l’utilisation des clauses de non-concurrence aux États-Unis. Il estime qu’elles nuisent à la mobilité des employés et que, par conséquent, les interdire favoriserait l’économie dans son ensemble. Les entreprises se verraient alors obligées de proposer de meilleurs salaires, le marché du travail deviendrait plus concurrentiel, et le tout se refléterait par une augmentation des salaires de près de 300 milliards de dollars par an aux États-Unis[1].
Rappelons-nous que pour être valide, en droit civil québécois, une clause de non-concurrence doit être limitée de façon raisonnable, quant à sa durée, son territoire et la nature de l’emploi qu’elle restreint. Elle est soumise à des conditions strictes de validité et de raisonnabilité et est évaluée notamment en fonction de ce qui est nécessaire pour protéger les intérêts légitimes d’un employeur[2].
Or, dans un contexte de pénurie de main-d’œuvre et d’augmentation du télétravail, quel sort devrait être réservé aux clauses de non-concurrence ? Les bannir pourrait certes favoriser la concurrence, mais cette interdiction pourrait-elle encourager l’inflation, l’augmentation des coûts et des délais devant les tribunaux, la création de fuites des compétences, des investissements au détriment des employeurs, l’accélération de la mouvance de la main-d’œuvre, alors que la rétention pose déjà un problème? Ne serait-il pas plus prudent d’encadrer davantage les clauses de non-concurrence au lieu de les bannir complètement (par exemple, limiter l’accès des clauses de non-concurrence à certains rôles et à certaines industries)?
[1]En ligne : https://www.ftc.gov/news-events/news/press-releases/2023/01/ftc-proposes-rule-ban-noncompete-clauses-which-hurt-workers-harm-competition.
[2] En ligne : https://www.avocat.qc.ca/affaires/iinconcurrence.htm.